Regarder mes garçons marocains américains savourer la coupe du monde

Mon fils de 8 ans est rentré de l’école cette semaine avec une mauvaise nouvelle. Son professeur de troisième année, m’a-t-il dit, était un fan de l’Argentine.

En fait, parmi ses pairs proches, mon fils né au Maroc n’a trouvé personne pour sa patrie lors de la Coupe du monde.

Et avec ça, c’était comme si personne ne le soutenait.

Bien qu’il fréquente une école culturellement diversifiée à Chicago, où l’on parle plusieurs langues, mon fils et ses frères font partie des rares élèves noirs. Ils sont également adoptés et neurodivers, ce qui les distingue même des autres enfants marocains.

C’est dur d’avoir 8 ans et d’être différent.

Mais la Coupe du monde et l’avance de Cendrillon du Maroc en demi-finale cette semaine ont donné à mon deuxième fils, comme tant d’autres dans la diaspora marocaine, une chance de célébrer son identité, aussi compliquée soit-elle, peu importe qu’elle soit encore en formation.

C’est émouvant de le voir, lui et ses frères, embrasser leur héritage d’une manière que je ne vois généralement pas en dehors du Maroc. Après chaque victoire, je les ai rencontrés après l’école avec la bonne nouvelle. Le Maroc a battu le Canada ! Le Maroc bat l’Espagne ! Nous avons agité des drapeaux tout le long du chemin du retour.

Mercredi, je les ai sortis de l’école pour le match de demi-finale contre la France. C’était plus qu’un match de football. Ce fut un moment historique pour les citoyens du monde africains, arabes et musulmans du monde. La demi-finale contre la France, qui abrite une énorme diaspora marocaine, a également été une leçon d’études sociales sur la politique et les colonies et les luttes pour l’indépendance.

C’était une leçon sur le choix et ce que, de notre passé, nous décidons de garder.

Nous avons parlé de tout cela alors que nous marchions vers le légendaire palais de l’Alhambra, à l’ouest de Chicago, où la communauté marocaine se réunissait pour regarder le match sur des écrans géants. Mon collègue marocain, qui est président de l’Institute for Global Arab Media and Democracy, nous avait invités puis nous a fait asseoir devant. Mes fils se sentaient comme des rois marocains.

Mon fils aîné, qui a 10 ans, s’est enveloppé dans une serviette de plage au drapeau marocain achetée au supermarché Marjane lors de notre dernier voyage là-bas en 2020. Il portait le maillot de l’équipe nationale, comme il l’avait été à chaque match de la coupe. J’ai des maillots de toutes les tailles pour les garçons à mesure qu’ils grandissent, juste au cas où il y aurait des années entre nos visites au Maroc.

En tant que mère, élevant trois garçons dans une famille transraciale, je suis chargée de donner le Maroc à mes fils jusqu’à ce qu’ils choisissent eux-mêmes leur allégeance. Ils ont la double nationalité et notre maison regorge de trésors marocains. Je ris quand des amis marocains me disent que notre maison est plus marocaine que la leur. Mais il le faut, car je n’ai pas d’histoire marocaine à leur raconter.

Parce qu’ils sont encore jeunes – le plus petit frère n’a que 4 ans – je pense souvent que j’aime le Maroc plus que mes garçons, surtout quand je leur demande de porter des vêtements marocains traditionnels pour des occasions spéciales.

J’aime le Maroc parce que c’est le pays qui a fait de moi une mère. Dans une danse matrimoniale, je m’approprie leurs coutumes, car c’est la seule façon de tenir le Maroc pour eux jusqu’à ce qu’ils l’atteignent par eux-mêmes.

Pour la diaspora marocaine, au nombre de 5 millions dans le monde, les Lions de l’Atlas leur ont donné une chance de se tenir ensemble, sans l’explication habituelle exigée des personnes aux accents ou à la peau brune qui ont des observances ou des coutumes religieuses différentes, qui ne sont pas européennes et blanches.

Lorsque les Lions sont entrés sur le terrain au Qatar, le premier pays arabe à accueillir une Coupe du monde, mes fils se sont tenus avec leurs compatriotes dans une salle de bal dorée à Chicago. J’ai ensuite regardé mon enfant de 8 ans prononcer les paroles de l’hymne national marocain, sa casquette et remettre son cœur comme le garçon américain qu’il est aussi.

C’est l’un des plus beaux cadeaux que leur donne leur citoyenneté américaine. L’Amérique est un lieu de gens de partout dans le monde. Dans son idéal, c’est un lieu qui fait place à chacun de nous. Je crois que ce potentiel existe même lorsqu’il est insuffisant. Je dois le croire. J’élève des immigrants en Amérique.

Mes fils ne sont pas de grands fans de football. Mon fils de 8 ans joue au flag-football américain avec son meilleur ami, qui est d’origine portoricaine et libanaise. Mais à ce moment mercredi, même dans le chagrin de la défaite contre la France, rien de tout cela n’avait d’importance.

C’étaient des garçons marocains et ils étaient chez eux.

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